L’équipe du festival et les quelques 26 500 de festivaliers qui allaient fouler le sol du Fort de Saint-Père avaient espéré ne pas la voir cette année, mais elle a bien fait son grand retour pour cette édition numéro 24 de la Route du Rock : la boue. Heureusement, le temps clément du vendredi et samedi, ainsi que les bottes de paille réparties dans le Fort ont permis d’endiguer le phénomène boueux.
Pop onirique
Jeudi soir, de doux riffs de guitare bercent les premiers festivaliers à braver les éléments, armés de leurs bottes et cirés. War On Drugs s’occupe de réchauffer l’atmosphère de mélodies délicieusement vintage et de solos de guitare de toute beauté. Ce n’est pas Kurt Vile, leur collègue de Philadelphie au look d’éternel ado tout aussi chevelu, accompagné des Violators, qui nous fait redescendre sur terre. On embarque sur un Freak Train, pour explorer les contrées de son dernier album Wakin On A Pretty Daze dont nous vous disions le plus grand bien l’année dernière. Peu loquace, Kurt Vile est fidèle à lui-même.
Sur la scène des Remparts qui est installée près de l’entrée du festival, Real Estate nous fait rêver d’un retour du soleil avec ses riffs de guitare aériens. Le groupe de Brooklyn déroule sans surprise les titres extraits du très réussi Days, et du redondant Atlas sorti cette année.
Très attendu sur la grande scène samedi soir, Mac DeMarco fait le show. Tour à tour crooner ou punk, le slacker ne montre que peu de respect envers la figure de l’Artiste. Vêtu d’un tshirt The Simpsons du plus bel effet, il annonce qu’il vient de se lever, avant d’entamer avec nonchalance des titres extraits du nouvel album Salad Days. On tend l’oreille et oui, c’est bien une reprise de Coldplay qui s’invite dans son concert. À force de voir gesticuler le personnage, on oublie un peu la musique, pourtant assez racée.
Nineties nostalgiques
Dans cette programmation pointue, la tête d’affiche est Portishead, jouant à guichets fermés le vendredi soir. Le groupe phare de Bristol, dont la chanteuse Beth Gibbons a une voix unique, sont invités à nous faire replonger dans leur trip-hop subtile. Une superbe occasion de fêter les 20 ans de l’album inaugural Dummy, le set faisant cohabiter les premiers titres du groupe (Glorybox, repris en chœur par le public) comme les plus récents issus du percutant Third. Ainsi, Silence ou Machine Gun prennent une dimension particulièrement puissante en live. The Rip offre un moment de grâce sous les étoiles. Beth Gibbons, créature mystérieuse semblant se cramponner à son micro et à son chant habité pour rester en vie, ose descendre dans la fosse toucher quelques mains dans le public en fin de concert. Les musiciens, impeccables, jouent le plus souvent dans la pénombre, les écrans en arrière-plan diffusant images abstraites, dessins ou extraits télévisuels.
Une soirée décidément très « nineties », avec Slowdive chargés d’ouvrir la voie à leurs compatriotes Portishead, dans un registre plus planant. Le groupe, qui n’a rien sorti depuis 1995 (Souvlaki), se reformait cette année. L’occasion de revisiter une courte discographie dans le pur style shoegaze qui a fait des émules depuis. Leur musique rêveuse, emplie de guitares aériennes, nous emporte loin, loin de Saint-Malo.
Déflagrations soniques
Côté Scène des Remparts, la programmation est plutôt punk-rock. Il est toujours assez difficile de rejoindre cette scène une fois le concert de la grande scène terminés, et nous l’aurons rarement vue de près. On en retient le maelström fou furieux de Cheveu, le rock néo-psychédélique de Toy ou les élucubrations électriques de Perfect Pussy.
Thee Oh Sees ne faillit pas à sa réputation de groupe de scène : menée par le rugissant John Dwyer, la formation de San Francisco que nous avions déjà croisée au City Sounds Festival (lire notre report) rentre dans le vif du sujet, mais peine à faire mouche sur la longueur. En début de soirée le vendredi, Anna Calvi séduit par sa pose rock innée, guitare et visage vers le ciel, avec une voix puissante de diva qui ne nous aura cependant pas touchés.
Ils sont jeunes, ils semblent sortir des 70′s. Tame Impala ? Non, Temples, visiblement pas là pour rigoler, mais pour devenir les nouveaux jeunes premiers du rock à tendance psychédélique. Et on ne peut s’empêcher de grimper avec eux vers les cieux de leur premier effort Sun Structures, jusqu’à un dernier rappel en forme de Shelter Song : refrain pop efficace et secouage de chevelure frisée.
Beats électroniques
De belles fins de soirées nous étaient promises cette année, et elles n’ont pas déçu. Jeudi, Caribou livre un set foisonnant, très maîtrisé, d’un son électro-house joué en live par des musiciens tout de blanc vêtus. Le groupe de Toronto, dont Dan Snaith est la tête pensante, en profite pour glisser quelques titres annonciateurs d’un nouvel album à paraître en octobre chez City Slang (Our Love, Can’t Do Without You), en plus des titres attendus de Swim , Odessa et Sun remportant le plus de suffrages. Joli concert qui reste cependant un poil trop poli.
Il fallait attendre samedi soir pour déguster l’une des plus belles prestations du festival : le mix de Jamie XX alterne créations de son cru, bons vieux titres (Sandwiches de Detroit Grand Pubahs), remix de la maison-mère The XX, rayon de soleil soul, et termine sur une montée synthétique nous projetant à Berlin, à la sortie des clubs et au lever du soleil.
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