Livres // Roman
EXILS, de N. Farah - Les Cerfs-Volants de Mogadiscio
Nuruddin Farah, réputé pour être l’une des plus grandes plumes africaines, sort son nouveau roman, Exils, une fresque mélancolico-policière.
Jeebleh, exilé depuis deux décennies aux États-Unis, retourne dans sa Somalie natale, toujours sujette aux interminables et sanguinaires guerres de clan. Il souhaite tout d’abord se recueillir sur la tombe de sa mère, morte depuis quelques années. Puis surtout aider Bile, son ami d’enfance, dans sa quête : retrouver sa nièce Raasta qui a été kidnappée. Mais Mogadiscio a bien changé depuis vingt ans. Les enfants tirent sur les passants, les sourires cachent méfiances et coups bas, et on prend beaucoup plus soin des morts que des vivants. Bienvenue en enfer.
C’était plus en africanophile averti qu’en érudit littéraire que s’est fait le choix de la lecture de ces Exils. Pourtant, arrivé à la 384ème page – et le doute n’a pas attendu ces dernières lignes pour s’installer – c’est le passionné et l’apprenti qui se sentent perdus, mais surtout quelque peu déçus.
Exils se lit facilement. Attention, il n’est pas de ces livres qu’on se force à finir, s’empêchant de fausser le pied d’un meuble pour lui trouver une utilité. En ne remettant nullement en cause le talent d’écriture de Nuruddin Farah (on dit qu’il est un des meilleurs, j’écoute, j’acquiesce), son nouveau roman semble souffrir d’un style souvent gauche, quelques fois lourd et de temps en temps un poil ennuyeux. Peut-être est-ce la faute à la traduction (votre serviteur ne lisant pas le somali).
Une exception, cependant. Rendons à Farah ce qui est à Farah. Il se dégage un souffle, un fil, qui nous pousse à tourner les pages : Mogadiscio. Les descriptions de la capitale, personnage à part entière, cette ville fantôme à feu et à sang, et malgré tout magnifique à travers les lignes, mériteraient presque à elles seules la lecture du roman.
Mais tout ceci ne justifie pourtant pas cela. L’histoire, sorte de western africain, de cet exilé retournant sur la terre de ses origines à la recherche d’un enfant, fait doucement penser aux Cerfs-Volants De Kaboul de Khaled Hosseini. Mais sa version somalienne n’en est que plus faible, son déroulement plus fastidieux, et son dénouement décevant. Comme si, ne prenant pas le risque d’y être abimé (comme le fut le livre d’Hosseini), Exils s’écrivait directement en modèle scénario.
Ce Farah, malheureusement découvert ici comme première lecture, ne semble pas si exceptionnel que ça. Et ces Exils, n’ont pas la saveur de la plume douce, mais percutante d’un Ahmadou Kourouma, la poésie exacerbée d’un Tierno Monénembo ou l’agréable rigueur d’un Benjamin Sehene.
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